Nos deux « lonely » cowboys se dirigent maintenant au cœur d’une région aussi majestueuse qu’austère, une terre de canyons où le désert est à la nature ce que la bière est à la soif : indissociable. Pour d’innombrables raisons, c’est l’eau qui en est le trésor. Plus que nulle part ailleurs, l’eau est source de création et dans un banal quotidien, une simple douche vous fait renaître à la vie.
Tapons fort pour reprendre notre récit : le Grand Canyon. Fascinant et merveilleux. Tellement gigantesque que l’on ne sait comment l’aborder. Malgré l’offre ingénieuse et pléthorique qui est proposée aux visiteurs (vol en hélicoptère, navette en bus, train, route panoramique, randonnées, rafting, etc…) il faudrait lui consacrer un mois (et encore…) pour parcourir comme il se doit cette merveille. Mais c’est avec un simple regard, même furtif, que l’on enregistre pour toujours dans sa mémoire cette vision surnaturelle. C’est un peu comme aller au Louvre pour n’y voir que La Joconde, cela semble absurde et pourtant, c’est peut-être faire preuve d’humilité que de se contenter d’un regard et repartir en se sentant déjà plus riche de l’intérieur. Vouloir tout voir n’est pas possible, se remémorer un instant l’est. Voir le Grand Canyon reste gravé de manière aussi puissante et inaltérable que l’a été sa lente et incalculable création. En trois mots : c’est magique !
Après seulement quelques heures donc, et en toute humilité, nous partîmes en direction de la fonctionnelle ville de Page. On pensait reloger au « Bob Motel », un ancien baraquement d’ouvriers tenu par un hurluberlu vivant dans sa roulotte au milieu du parking attenant mais tristesse… l’affaire a été reprise, des (superbes) rénovations faites et c’est dans un véritable appartement battant neuf que nous logeons. L’hurluberlu a été balayé par les vents. Le luxe a supplanté l’originalité
On compensera en faisant très original en allant (re-)visiter Bryce Canyon. Original car nous ferons l’aller retour de 300 kilomptres en mois d’une journée, juste pour le plaisir de pouvoir contempler à nouveau ce canyon unique, érodé toute en finesse.
C’est sans doute un des canyons de la région le plus apprécié car il est facile d’accès, on arrive à en prendre la mesure et il est… très photogénique (élément important quand on cherche à justifier le déraisonnable investissement dans son nouveau Canon). Comme la première fois, on adore le lieu et on s’y ballade tranquillement à travers les fameux hoodoos (aiguilles rocheuses) et des cohortes de… français ! Rien d’étonnant donc (pardon … amis(es) tricolores) à ce que l’on décida de rallier le petit Red Canyon, situé en aval du beau Bryce, pour y retrouver un peu de quiétude, loin de l’ambiance « Metro ».
Sur la route du retour, on tenta de calculer le degré d’attractivité de la région et le nombre de jours qu’il nous faudrait pour découvrir toutes les richesses géologiques du coin… mais Chut, bon nombre de gens ne s’y intéresse pas assez et passe à côté. Comme nous en fûmes nous-mêmes privés (faute à la météo) nous ne parlerons pas de… The Waves, des slots Canyons et autres arches… Chut !
Outre la vivifiante vue de Lake Powell, grand lac artificiel qui permet de verdir comme par enchantement des milliers d’hectares de désert et d’étancher la trop grande soif de Vegas, l’eau nous gratifia de son incongrue présence au travers d’un orage d’anthologie qui nous obligea à notre retour à prendre la pelle pour qu’elle ne s’invite pas dans le bel appartement sous les encouragements terrifiés et paniqués du nouveau proprio qui.. a eu une nuit agitée…
Deux jours de luxe avec douche, laverie, pizza… c’est bon, on peut repartir pour quelques miles. Photo crochet obligé à Monument Valley, on sort le chapeau et le Jack pour plus d’authenticité. Notre vénérable Prius est trop basse pour s’aventurer par de là le désert et les courbatures persistantes dues aux trépidants galops au Canyon de Chelly n’invitent pas à remonter en seller pour jouer au Yakari sur son Petit Tonnerre. A la John Wayne, on relève notre chapeau… « silence »… et on (se) tire.
Traversant la paisible « Valley of the Gods » (mais que fait la Censure américaine !) on rallie par de là les mesas (plateaux rocheux rappelant une table, « mesas » en espagnol) notre campement. On en profite pour s’interroger sur le paradoxe d’une Amérique toujours plus égo-conservativo-américaine dans la défense de sa position de tête et son hispanisation galopante (population, médias, communication). Où quand l’ironie à trouver son territoire.
Camping, nuit ronflante et ballade matinale avant que ce ne soit trop… caliente, ainsi fût vécut le peu couru National Bridge Monument, une étape qui fleura bon le pin pinderosa et abaissa la température de quelques fahrenheits…
Pas de récit de Canyon sans un passage à Canyonland… Ce parc en trois parties (Island in the Sky, The Needles, The Mazes) regroupe tout ce qu’on peut attendre dans un voyage dans le Sud de l’Utah : désertique, étouffant, solitaire, avec une rivière sinueuse, des roches rougeoyantes et un magasin qui vend de la bière fraîche et de la glace !
Dépassé la sensation de pesanteur qui fait coller les baskets au sol et on peut partir à loisir vers des aventures uniques et infinies. Parfois suffocante, l’ambiance y est magnétique, chaque pas en avant vous enfonçant vers un isolement grisant et terrifiant (maudites bêtes sauvages, maudits films hollywoodiens… !). Mais une fois de retour derrière son volant, on a presque l’impression de s’être dépassé et d’être venu à bout d’un sortilège infernal ! (Basé sur une expérience vécue, 43°, juillet 2012).
C’est finalement vu de la route que nous terminons ce périple dantesque en remontant la rivière Colorado qui est comme le Styx d’une mythologie de l’Ouest. Dernier canyon, plus un digestif costaud pour faire passer le tout en faite, le Colorado National Monument : un canyon en altitude qui marque le passage vers une autre étape, celle de l’insouciante fraîcheur… Quoique en ces temps de réchauffement climatique, tout se dérègle !
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